Par un arrêt en date du 30 mars 2016, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que les cédants de parts sociales ayant donné une image trompeuse des résultats d’une société cédée au cours des mois ayant précédé la cession, et ayant dissimulé au cessionnaire les informations qu’ils détenaient sur l’effondrement prévisible du chiffre d’affaires réalisé avec au moins deux des principaux clients de l’entreprise ont vicié le consentement du cessionnaire.
Ces éléments étaient déterminants pour ce dernier, lequel n’aurait pas accepté les mêmes modalités d’acquisition s’il avait eu connaissance de la situation exacte de cette société. Dès lors les réticences dolosives imputables aux cédants entraînent la nullité de la cession.
Par cet arrêt, la Cour de cassation emboîte le pas de la réforme du droit civil opérée par l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 qui entrera en vigueur le 1er octobre 2016.
Ladite réforme consacre la réticence dolosive comme cause de nullité relative d’une cession lorsqu’elle revêt un caractère déterminant, notamment lorsque l’information est dissimulée de manière volontaire.
La Cour de cassation renforce le devoir d’information du cédant de parts sociales et la protection du cessionnaire et vient pallier le déséquilibre informationnel des parties. Tout cessionnaire, même en l’absence de convention de garantie de passif, peut ainsi à présent s’appuyer sur le droit commun des contrats pour demander l’annulation d’une cession d’actions en cas de réticence dolosive déterminante de son consentement.
En outre, il est à noter qu’à l’appui de leur pourvoi, les cédants prétendaient en effet que seul le dol principal ou déterminant (i.e., dol en l’absence duquel la victime n’aurait pas contracté) aurait pu entraîner la nullité du contrat de cession ; ce qui n’est pas le cas du dol incident relevé par la Cour d’Appel (i.e., dol en l’absence duquel la victime aurait tout de même conclu le contrat mais à des conditions différentes).
Cette dichotomie n’a cependant pas convaincu la chambre commerciale qui confirme ainsi l’abandon de la distinction entre le régime du dol principal et celui du dol incident en matière de nullité du contrat de cession. La Cour de cassation anticipe l’entrée en vigueur du nouvel article 1130 du Code civil qui disposera dès le 1er octobre 2016 que le dol vicie le consentement lorsqu’il est « de telle nature que, sans [lui], l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes ».
Avr 15, 2016 | Fusions & acquisitions